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Honduras : un défenseur de l’environnement assassiné, la présidente promet la « justice »

Un défenseur de l’environnement au Honduras a été assassiné par balle, samedi 14 septembre au soir dans le nord-est du pays, l’un des plus dangereux au monde pour les militants écologistes. Un meurtre fermement condamné par les autorités, qui ont promis que « justice » serait faite. Selon la presse locale, Juan Lopez, 46 ans, a été tué alors qu’il se trouvait dans sa voiture après s’être rendu dans une église à Tocoa, où il vivait, et dont il était conseiller municipal. Rencontré en 2021 par l’Agence France-Presse (AFP), il avait raconté vivre dans l’angoisse depuis qu’il luttait contre une exploitation minière installée près de chez lui, dans une zone de montagne et de forêt du nord-est du Honduras.
« Nous condamnons l’assassinat ignoble de notre camarade et leader écologiste Juan Lopez à Tocoa. J’ai ordonné à toutes les forces de l’ordre de faire la lumière sur cette tragédie et d’identifier les responsables », a déclaré la présidente de gauche du Honduras, Xiomara Castro, sur X. « Justice pour Juan Lopez », a-t-elle promis. L’écologiste était membre du parti Libre, au pouvoir. Son épouse, Thelma Peña, a indiqué, dans un bref échange téléphonique avec l’AFP, que M. Lopez avait été la cible de « tirs » en sortant d’une église, où elle n’était pas présente.
Le procureur du Honduras, Johel Zelaya, a lui salué un homme dont « la vie était un exemple de lutte », indiquant que des « équipes spécialisées enquêtaient déjà pour que sa mort ne reste pas impunie ». Dimanche matin, la police a demandé « au public détenant des informations pertinentes concernant l’acte criminel de communiquer confidentiellement » via la ligne d’urgence 911.
Le militant accusait le groupe minier Los Pinares d’exploiter une mine à ciel ouvert dans des conditions qui portent atteinte à la réserve forestière de Botaderos, près de Tocoa, à 220 km au nord-est de Tegucigalpa. Cette réserve compte trente-quatre bassins hydrographiques, avec des arbres de grande valeur et des espèces d’animaux menacés d’extinction, ainsi que des gisements archéologiques précolombiens.
Juan Lopez avait confié à l’AFP, en novembre 2021, qu’on l’avait averti qu’il lui arriverait la même chose qu’à Berta Caceres, une célèbre défenseuse de l’environnement, abattue le 2 mars 2016 parce qu’elle s’opposait à la construction d’un barrage hydroélectrique dans l’ouest du pays. « Quand on se met à défendre le bien commun dans ce pays, on s’attaque à de puissants intérêts (…). Quand on sort de chez soi, on sait qu’il peut se passer n’importe quoi, qu’on peut ne pas revenir », avait expliqué le militant, alors père d’une petite fille de 5 ans. Il avait raconté ne jamais sortir de nuit et ne pas aller seul dans un secteur éloigné : « C’est tragique. La peur, c’est de perdre la vie. »
Le Conseil civique des organisations populaires et indigènes du Honduras, cofondé par Mme Caceres, a accusé l’Etat et le gouvernement Castro d’être « responsables d’un nouvel assassinat ».
Par ailleurs, M. Lopez avait récemment demandé, lors d’une conférence de presse, la démission de responsables du parti Libre qui apparaissaient dans une vidéo, divulguée par un site spécialisé, en train de négocier des pots-de-vin avec des narcotrafiquants en 2013. Cette vidéo montrait Carlos Zelaya, le beau-frère de Xiomara Castro, qui a démissionné de ses fonctions de député après avoir reconnu avoir participé à la réunion.
La représentante au Honduras du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’Homme, Isabel Albaladejo, a elle appelé l’Etat à enquêter en prenant « en considération » les dénonciations de M. Lopez « contre le maire [de Tocoa] Adan Funez, dont il avait demandé la démission pour de présumés liens avec le crime organisé », ce qui aurait pu lui valoir des « représailles ».
La coordinatrice du Comité des proches des détenus et disparus au Honduras, Bertha Oliva, a souligné que M. Lopez « était un être humain extraordinaire, un homme du peuple qui a donné sa vie pour son peuple ». « C’était un intellectuel populaire, un camarade engagé dans le changement social, dans la défense du bien commun », a déclaré à l’AFP Joaquin Mejia, avocat et défenseur des droits de l’homme, son partenaire dans la lutte pour la préservation du fleuve Guapinol.
M. Lopez a été inhumé dimanche dans la municipalité de Tocoa. « Ils ont tué Juan Lopez, mais pas sa lutte », pouvait-on lire sur une banderole placée sur le cercueil du militant dans un funérarium, a constaté une équipe de l’AFP. A l’intérieur aussi bien qu’à l’extérieur du funérarium, des centaines de personnes attendaient une messe rendue en hommage à l’activiste.
Selon un rapport de l’ONG Global Witness, le Honduras est l’un des pays les plus dangereux pour les défenseurs de l’environnement. En 2023, il arrivait en troisième place dans le monde pour le nombre d’assassinats de militants écologistes, à égalité avec le Mexique (18), derrière la Colombie et le Brésil. Entre 2012 et 2023, 148 militants écologistes y ont été tués.
Le Monde avec AFP
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